• 06 Souvenir/Le maître du jeu/Souvenir/Jérém au rugby

    13 Souvenir de Jérém
    (Septembre 2000, à la rentrée, moins d’un an avant la « première révision »).

    « Don’t tell me to stop »

    Le revoilà, Jérémie. Qu’est-ce qu’il m’a manqué tout au long de l’été ! Lorsque je l’ai quitté fin juin, il était déjà beau comme un Dieu. Et là, je le retrouve encore plus beau, plus sexy que jamais, sexy à se damner.
    Il fait encore très chaud en ce mois de septembre 2000, le jour de la rentrée. Le torse enserré dans un débardeur blanc à larges bretelles, histoire de mettre bien en valeur son bronzage de ouf, ainsi que sa masse musculaire qui semble encore avoir gagné du volume pendant l’été.
    Un débardeur qui lui laisse tout le loisir de bien exhiber un brassard au motif tribal tatoué juste en dessous de son biceps gauche. C’est nouveau, ça vient de sortir.
    Son brushing a un peu changé, ses cheveux sont un peu plus en bataille. Son déo de mec, nouveau lui aussi, me frappe violemment lorsque nous échangeons un « Salut », vite fait, en nous croisant dans la cour.
    Je tends l’oreille et je l’entends parler avec les autres camarades de ses vacances à Gruissan. C’est là qu’il s’est fait tatouer ? Frustration déchirante de ne pas faire partie de sa vie, de ses potes, de ses vacances.
    J’ai envie de pleurer tellement j’ai envie de lui, tellement cette beauté masculine m’est inaccessible.
    Je suis obligé de m’enfermer dans les chiottes du lycée pour me branler, pour me calmer, pour éviter de devenir fou dès le premier jour de la rentrée.
    Jérém est de plus en plus populaire au lycée. Ses exploits au rugby suscitent l’admiration. Tout comme ses exploits, aussi nombreux qu’éphémères, avec la gent féminine. La « rumeur » veut qu’il serait un sacré bon coup…
    « Don’t tell me » est la bande son de cette rentrée.
    Voir Jérém torse nu dans les vestiaires au cours de sport est une véritable torture, et encore plus depuis qu’il arbore ce tatouage qui rajoute du bandant au sexy.
    Force est de constater que, plus le temps passe, plus Jérém se fait « mec ». Jour après jour, le bobrun prend de l’assurance, il finit même par se la péter un peu, parfois même beaucoup. Il le sait qu’il est beau gosse, qu’il plaît. Pourtant, il semble chercher sans cesse confirmation du pouvoir de son charme dans les regards autour de lui.
    J’ai envie de lui, grave envie de lui. Je ne compte plus les branlettes que je me suis tapées en pensant à son corps, à sa bonne gueule de mec. Avoir autant envie de quelqu’un, si proche pourtant, quelqu’un que l’on côtoie tous les jours, et n’avoir pas le moindre espoir d’assouvir ce désir. C’est tellement dur à vivre au quotidien que je voudrais que ça cesse, je voudrais me réveiller un matin et ne plus être si furieusement attiré par lui.
    Mais je n’y peux rien…

    Tell the rain not to drop/Dis à la pluie de ne pas tomber
    Tell the wind not to blow/Dis au vent de ne pas souffler
    Tell the sun not to shine/Dis au soleil de ne pas briller
    But please don’t tell me to stop/Mais s’il te plaît ne me demande pas de m’arrêter
     


    14 Le maître du jeu

    Le lendemain de cette bonne baise avec Jérém devant le miroir de sa salle de bain, j’ai très envie qu’il me propose de « réviser » après la fin des cours. De son côté, le bobrun m’ignore comme il sait si bien faire. A la fin des cours, je le regarde partir sans se retourner.

    Mercredi 16 mai 2001.

    Ce n’est que le mercredi que le bogoss vient me voir, entre midi et deux, et il me balance :
    « Salut… 18 heures chez moi, ok ? ».
    Et c’est reparti pour un tour.
    En marchant dans la rue, en direction de l’appart de la rue de la Colombette, je me pose toujours et encore la même question : pourquoi, moi ?
    Autrement dit, comment est-ce possible que ce mec, qui pourrait avoir la plupart des nanas de la ville, et pas mal de mecs autrement plus sexy que moi, a envie de baiser avec moi ?
    Cela devrait me flatter. Pourtant je ne peux m’empêcher de penser que s’il a envie de baiser avec moi, c’est avant tout parce que je suis à sa complète disposition, le vide-couilles idéal, disponible à la demande, avec qui il peut assouvir toutes ses envies au pieu.
    Il me sonne, je me ramène en courant. Il me baise, il me dit de me casser, je me casse. Pas de comptes à rendre, pas d’attentions à avoir, pas de fidélité à promettre. La baise pure, la baise sans capote, sans se soucier de MST (c’est le seul mec avec qui j’ai couché), et/ou de grossesse indésirable. Le plaisir débridé et l’esprit léger, car il sait bien que je ne cafterai pas sur ce qui se passe dans son studio. Et ce, moins à cause de ses menaces que du fait que je ne suis pas prêt à assumer mon homosexualité au grand jour. Et, surtout, je ne cafterai pas parce que je sais que si le moindre bruit arrivait à ses oreilles, il mettrait un terme immédiat à nos « révisions ». Et c’est bien celle-ci ma plus grande hantise.
    Bref, nos « révisions » sont la configuration de baise parfaite pour un gars qui a envie de se vider les couilles sans se prendre la tête.
    Pourtant, en montant les escaliers de son immeuble, les doutes laissent vite place au bonheur. Je me dis que je vais encore le voir à poil, le sucer, que je vais encore me faire sauter par ce canon de gars que tout le monde rêve de mettre dans son pieu. C’est grisant de pouvoir me dire que je suis certainement le seul qui connaît cette facette de sa sexualité, sa bisexualité.
    Lorsque j’arrive devant la porte de son studio, je m’aperçois qu’elle n’est pas verrouillée. Le battant est juste appuyé au cadre, comme si j’étais attendu. Je tapote quelques coups légers, et je l’entends me lancer :
    « Rentre… ».
    Je pousse le battant et l’image du bogoss s’imprime immédiatement dans ma rétine, aveuglante. Jérém est sur le lit, dans son plus simple appareil, la queue tendue, en position accoudée, position connue également sous l’intitulé de « Qu’est-ce que tu attends pour venir me sucer ? ».
    Je referme la porte derrière moi, envouté par cette vision de bonheur. Je monte sur le lit, je me faufile entre ses cuisses et je le prends en bouche.
    Je suis tout bonnement subjugué par cette queue bien tendue, par ce gland gonflé à bloc qui emplit mon palais, par ce mât à la peau douce autour duquel ma langue se balade avec délectation.
    La position de son corps m’offre une vision panoramique de son torse époustouflant, ainsi que de l’étendue des bleus imprimés sur cette perfection plastique.
    Non, il n’y a pas que son nez et son front qui portent les traces des coups reçus pendant le match. Le haut de son torse et son épaule ont également bien chargé. Sur son flanc droit, là où l’armoire à glace de l’équipe adverse l’a si violemment percuté, il y a un gros hématome.
    Mon pauvre Jérémie, il est vraiment amoché. Soudain, je me dis que c’est peut-être la raison pour laquelle il n’a pas provoqué de « révisions » depuis quelques jours.
    D’ailleurs, le bogoss a un brusque geste de recul lorsque j’effleure ses pecs. Je renonce à tâter ses muscles, tout en mettant encore plus d’entrain à faire plaisir à sa queue.
    « C’est bon ça… » je l’entends lâcher, très excité « vas-y, avale-la bien à fond… ».
    Joignant le geste à la parole, il pose une main sur ma nuque pour faire avancer encore ma tête et enfoncer davantage sa bite au fond de ma gorge.
    Il aime ça. Et moi aussi.
    Il ne me faut pas le pomper beaucoup plus longtemps pour qu’il délivre dans ma bouche ce cadeau délicieux, une série de bonnes giclées de son jus de mec que j’avale avec un bonheur total.
    Puis, la cigarette l’éloigne de moi pendant quelques minutes.
    Lorsqu’il revient, je suis allongé sur le lit, en train de me branler. Et alors que je m’attends à une réplique de petit con à la queue frétillante, du genre « tu vas prendre cher », je l’entends me balancer, sur un ton sans appel :
    « Vas-y mec, rentre chez toi… ».
    Me voilà soudainement frustré à mort. Mais pourquoi ? Evidemment, je n’ose pas lui demander. De toute façon, je sais qu’il serait inutile d’insister. Il voulait juste une pipe, il m’a fait juste fait venir pour une pipe.
    C’est Jérém le maître du jeu.


    15 Souvenir de Jérém
    (Novembre 2000 : six mois avant « première révision »).

    Son corps musclé émerge d’un brouillard de vapeur, sublime féerie sensuelle. L’eau chaude ruisselle sur sa peau. Vision de son dos, le bogoss est face au jet de la douche. La première chose qui happe mon regard, qui embrase mon désir, ce sont ses épaules, leur envergure, l’angle parfait qu’elles dessinent avec son cou, leur musculature saillante.
    Deux ans de lycée et deux ans de cours de sport, pourtant je ne l’ai encore jamais vu sous la douche.
    C’est con, ce mec m’attire plus que n’importe quel gars sur terre, et j’ai toujours évité de me trouver sous l’eau en même temps que lui. Trop « peur » de me retrouver à poil devant lui, au sens propre, peur qu’il se moque de moi, de mon physique qui n’a rien à voir avec le sien. Et peur aussi de me retrouver à poil devant lui, au sens figuré, peur que mon regard me trahisse, qu’il échappe à mon contrôle, peur qu’il me perce à jour, peur qu’il se rende compte que je ne peux pas décoller les yeux de son corps, peur qu’il sente mon désir, peur de bander. Et peur qu’il me mette sa main dans la gueule.
    Mais aujourd’hui, alors que j’ai fait comme d’hab, que j’ai traîné exprès sur le terrain de sport pour qu’il ait le temps de se doucher et de partir avant que j’aille prendre ma propre douche, je me suis « fait avoir ».
    Et alors que je pensais qu’il était déjà parti, je me retrouve devant cette image fantasmée, désirée, inattendue, aveuglante.
    Je me sens comme un lapin pris dans les phares d’une voiture, mon regard se fige, mon cerveau surchauffe et bugge, je perds tous mes moyens. Je me retrouve planté là comme un con, le cœur à mille à l’heure, la respiration coupée, la déglutition bloquée, le ventre en état de choc comme si je venais de ramasser un coup de poing puissant.
    Je me perds en détaillant le V parfait qui se dessine entre ses aisselles et ses reins. C’est tellement beau un dos bien bâti, ça semble dire tant de choses au sujet de la puissance physique et de la virilité du mec qu’on regarde.
    Mon regard glisse le long de ce V vertigineux et finit par se laisser happer par ses fesses musclées, par ses cuisses puissantes, par ses mollets de sportif.
    Ses mains parcourent sa peau, du haut du corps vers le bas, étalant le gel douche depuis ses beaux cheveux bruns jusqu’à son sexe, que je ne vois pas, puisqu’il est toujours de dos.
    Comment je voudrais qu’il se retourne ! Je crève d’envie de découvrir enfin cette partie de son anatomie sur laquelle je fantasme depuis plus de deux ans.
    En attendant, son corps caressé par l’eau chaude me rend dingue. Les mouvements des muscles, des épaules et du dos, provoquent en moi un émoustillement et une sensation de bonheur indescriptibles.
    Tous mes sens sont en émoi. Je suis hypnotisé, tétanisé par tant de beauté masculine. Je n’ai jamais « rien » vu ni personne de si beau de ma vie.
    Devant tant de beauté et de bonheur, je me dis qu’il ne peut vraiment pas y avoir de mal à apprécier la vue d’un beau gosse.

    It’s human nature/No regrets, no regrets/ And I’m not sorry

    Car c’est sa beauté, et tout ce qu’elle provoque en moi, qui, jour après jour, m’aide à reconnaître, à apprivoiser, à assumer qui je suis.
    Lorsque je regarde ce mec, je me sens vivant comme jamais auparavant. J’ai l’impression que mes sens sont décuplés, que mon corps est devenu hypersensible. J’ai l’impression que pour la première fois de ma vie, je sens vraiment l’air passer dans mes poumons, que ma peau est parcourue par des frissons incessants, que tout, dans cette pièce des douches, l’humidité, la température, le moindre déplacement d’air, mais aussi le parfum du gel douche, le bruit de l’eau qui tombe sur ses épaules, provoquent en moi des sensations de dingue. Des papillons, mais carrément des Monarques, remuent sans cesse dans mon ventre, sans compter la trique qui me gagne, et ce frissonnement insistant entre mes fesses…
    Ça me prend aux tripes, ça me ronge à l’intérieur. J’ai envie de crier tellement j’ai envie de lui et tellement je sais que cette envie je la garderai à tout jamais en moi, silencieuse, ravageuse, frustrée. Cette envie qui me consume.
    Je ne sais pas combien de temps je suis resté planté là à le mater sous la douche, comme si rien d’autre n’existait autour de nous. Peut-être que quelqu’un l’a remarqué, mais je m’en fiche.
    Je ne sais pas si ça a duré une, dix, cent ou mille secondes. Ce que je sais en revanche c’est que, même si ça n’a duré qu’une seconde, ça a été une seconde si intense, traversée par d’innombrables désirs et révélations, un instant d’éternité volé au temps.
    Je regarde l’eau glisser sur son corps, et je ressens l’envie de laisser mes lèvres glisser de la même manière sur sa peau, embrasser ses oreilles, caresser son cou, glisser sur ses épaules, descendre, inexorablement, le long de la ligne parfaitement sinueuse de son dos, franchir la barrière de ses reins, et s’insinuer entre ses fesses.
    Tourne-toi, mec, j’ai trop envie de voir ta queue. Et même si le simple fait d’imaginer comment elle est c’est déjà très excitant en soi, le fait d’être si proche du bogoss à poil, me donne une furieuse envie de la voir. Tourne-toi, mec, s’il te plaît, montre-moi comment tu es monté. Juste « comment », le « combien » je m’en fiche pas mal. J’ai juste envie te connaître un peu plus.
    Je l’ai souhaité de toutes mes forces. Et il a fini par le faire. Le bogoss ferme le robinet d’eau chaude et se retourne pour attraper la serviette, alors qu’il aurait pu juste allonger le bras. Il doit être grave à l’aise avec son corps, sûr de lui, pour se montrer ainsi. Evidemment, il a de quoi.
    Oui, il se retourne. Image furtive de ce corps de petit Dieu vivant, les cheveux bruns trempés, le visage, le cou, les bras, le torse mouillés et brillants. Et cette queue qui se montre enfin, cette queue plutôt prometteuse, même après cette longue douche. Vision qui est à la fois délivrance, bonheur, excitation, fascination, frustration.
    Image furtive, celle de son regard qui capte mon regard en train de mater sa queue. Souvenir de ses bras qui stoppent net le mouvement qu’il avait entrepris de façon mécanique, celui de porter la serviette sur ses cheveux ruisselants pour commencer à sécher le corps du haut vers le bas. Souvenir de ses bras qui reviennent même un peu sur leur mouvement, comme pour lui permettre de bien me dévisager, l’air surpris de me trouver planté là, en train de le mater, avec cette tronche de con.
    Oui, le bogoss a l’air surpris, mais en même temps, il ne fait rien pour cacher sa nudité. Au contraire, j’ai même l’impression qu’il est pas mal fier de me voir autant impressionné par son corps.
    Grave envie de me jeter sur sa queue, de la sentir grossir dans ma bouche, de lui faire plaisir, de le faire jouir. L’envie me déchire de l’intérieur, j’en ai mal au ventre.
    Pourtant, honteux, je me tire, je m’éloigne de ces douches dont je ne me servirai pas aujourd’hui. Je m’éloigne pour aller m’habiller vite et partir au plus tôt. Je m’éloigne en espérant qu’il ne vienne pas me chercher des noises ou, pire, qu’il ne me traite pas de pd devant tous les camarades.
    Heureusement, il ne fera ni l’un, ni l’autre. Ses seules « représailles » seront de m’en mettre plein la vue en se ramenant devant son casier, en se baladant devant moi avec la serviette nouée bien basse autour de la taille, à la limite du pli de l’aine et de ses poils pubiens.
    Pour m’achever, le bogoss m’envoie un petit clin d’œil diabolique, accompagné d’un petit sourire narquois, malicieux, une attitude dans laquelle j’ai l’impression de comprendre un truc du genre :
    « Je sais que tu me kiffes, espèce de petit pd. Tu peux baver tant que tu veux, mais ma queue tu ne l’auras jamais… ».

     
    16 Jérém au rubgy

    Après cette pipe vite fait chez lui, le reste de la semaine s’écoule sans que le bobrun ne me convie à une nouvelle « révision ».
    Le vendredi soir arrive très vite, trop vite, le week-end avec. Je déteste le week-end, ces deux jours qui m’empêchent de le voir. C’est le cas depuis le début du lycée, depuis le premier jour où son existence a croisé la mienne. Mais ça l’est d’autant plus depuis le jour où sa sexualité a croisé la mienne.
    Je garde quand même mon portable tout près de moi, en vérifiant à chaque minute mes messages. Désormais, il a mon 06, il peut s’en servir, si l’envie lui en prend. Même si le bogoss m’a bien dit qu’il n’appellerait pas, je garde espoir. J’espère pour rien.
    D’autant plus que son week-end va être bien rempli. Entre le rugby, les troisièmes mi-temps, la sortie du vendredi soir, celle du samedi soir, celle du dimanche soir, la baise du vendredi soir, celle du samedi soir, celle du dimanche soir, le bobrun ne va pas chômer.
    Je sais à quel point il est un sacré fêtard, doublé d’un incorrigible queutard. Ça m’est arrivé d’assister à ses exploits en soirée, et j’en ai régulièrement des échos en début de semaine. Aussi, c’est lui-même qui me l’a certifié, il n’y a pas longtemps : « Trop révisé hier soir… ».

    Samedi 19 mai 2001

    Le samedi matin je me réveille avec une trique d’enfer, avec l’envie débordante de le voir, de le voir à poil, de toucher son corps, de le sucer, de le sentir en moi, de le faire jouir, de le voir jouir.
    Je me branle une fois, deux fois, mais cela n’arrive pas à étancher ma soif de lui. Plus je me branle, plus je pense à nos galipettes, plus je me dis que je ne vais pas tenir deux jours sans le voir. Au moins le voir, j’ai vraiment besoin de le voir. Mais comment ?
    Soudain, une idée lumineuse fait son apparition dans ma tête. Mais oui, je suis con ! C’est le week-end, et le week-end, il y a le match de rugby. Alors, oui, je vais le trouver sur le terrain de rugby ! Comment j’ai pu ne pas y penser plus tôt ?
    D’autant plus que, pendant toute la semaine, j’ai entendu parler du match que son équipe doit jouer ce dimanche après-midi, à domicile !
    C’est décidé, je vais aller au match. Et comme je ne veux pas me retrouver seul comme un con, j’ai la bonne idée de proposer à ma cousine Elodie de m’accompagner.
    Elodie a quelques années de plus que moi, et nous nous entendons super bien, nous rigolons comme des malades. Elle est drôle, avisée, rusée, bienveillante, et elle est toujours de bon conseil. Elle sait tout de moi, sauf que je suis gay.
    Lorsque nous arrivons au stade, le match est sur le point de commencer. Les deux équipes sont en train de rentrer sur le terrain, et je balaie fébrilement le terrain à la recherche de mon bobrun. Mais ma cousine est plus rapide que moi.
    « Mais mate-moi ce putain de beau gosse ! »je l’entends lâcher de but en blanc.
    « Mais tu parles de qui ? » je ne peux m’empêcher de lui demander, surpris de sa sortie, et très curieux de savoir lequel des jeunes mâles sur le terrain lui a tapé dans l’œil.
    « Le numéro 11 de l’équipe de Toulouse, qui d’autre ? Ce mec est vraiment canon ! » fait-elle du tac-au-tac, comme un cri venant du plus profond du cœur.
    Je le repère enfin sur le bord du terrain, maillot blanc et vert, portant le numéro 11. Sur le terrain de rugby, dans son maillot, Jérém est sexy à mourir.
    Le maillot n’est même pas particulièrement bien coupé. C’est sa façon de le porter, avec le col grand ouvert, remonté derrière le cou, avec cette attitude de petit con qui ne fait pas comme tout le monde, qui en fait une tenue sexy en diable. C’est aussi ce que ce maillot représente, bien au-delà d’un simple vêtement – le symbole ultime de sa passion, de ce jeu auquel il se consacre corps et âme– qui en fait une tenue sexy à craquer.
    Le match commence. Je ne quitte pas Jérém des yeux, et très vite je suis happé par son énergie sur le terrain, par son attitude déterminée et fonceuse.
    Je ne connais rien à ce sport, mais ça saute aux yeux, le ballon ovale est vraiment dans son ADN. Ce mec est passionné, il en veut, il s’applique à fond, et c’est beau à voir. Exit le branleur qui n’en fout pas une en cours, voilà un mec qui se donne à fond.
    Sur le terrain de rugby, le mystère Jérém se dévoile un peu sous mes yeux. Assister à ses exploits, le voir entouré par ses co-équipiers, admiré et/ou jalousé par les supporters de son équipe, maté sans vergogne par les nénettes aux abords du terrain, toute cela contribue à donner à ce maillot numéro 11une charge masculine envoûtante.
    Un coéquipier de Jérém attire également mon attention. Très sexy dans son maillot numéro 9, le jeune demi de mêlée n’est autre que son grand pote Thibault. Ça doit faire presque un an que je ne l’ai pas vu, depuis la soirée à la fête à Fenouillet l’an dernier.
    Et qu’est-ce qu’il est bien foutu lui aussi ! Tout comme Jérém, en l’espace d’un an il a bien gagné en masse musculaire. Ses épaules sont carrées, son cou est puissant, ses biceps semblent carrément devoir exploser les manchettes du maillot. On dirait un petit taureau, tout en muscles, pourtant très élégant, très vif, très rapide.
    Thibault récupère le ballon dans la mêlée et le balance à son pote Jérém. Ce dernier l’attrape et pique un sprint sur la ligne de touche. Les joueurs de l’équipe adverse tentent de barrer son avancée. Il arrive à en éviter trois, l’un après l’autre, mais un quatrième surgit, plaque violemment mon Jérém au sol et lui fait perdre le ballon.
    La faute volontaire est accordée. Mon bobrun tire la pénalité mais le ballon ovale vole à l’extérieur des deux poteaux. Le bobrun fait la gueule. Et putain qu’est-ce qu’il est sexy quand son regard brun devient noir, lorsque ses yeux si charmants se mettent à fulminer !
    Le match reprend. Nouvelle mêlée, nouvelle passe de Thibault, nouveau sprint de Jérém vers la ligne de but. L’un des joueurs de l’équipe adverse, un immense brun plus grand et plus baraqué que mon Jérém se rue sur ce dernier comme un boulet dans un jeu de quilles. Il le percute avec sa masse importante multipliée par la force de son élan, sans ménagement.
    L’impact a été si violent que Jérém n’arrive pas à se relever tout de suite. Allongé sur le dos, les genoux pliés, la respiration agitée, le visage parcouru par une grimace de douleur, mon bobrun a l’air de morfler.
    Ses coéquipiers s’agglutinent autour de lui, le médecin arrive dans la foulée. Ce dernier se penche sur le bogoss, lui parle, pose ses mains sur son thorax. Un instant plus tard, le bobrun se met en position assise, accoudé.
    Aaaah, putain ! Comment je lui connais bien cette position, lors de moments bien plus agréables que celui-ci. Soudaine et brûlante envie de me faufiler entre ses jambes pour lui tailler une pipe de fou !
    Mais alors que je dérive dans mes chaudes rêveries, mon bobrun arrive enfin à se remettre debout. Il essaie de marcher, il avance en boitant, se tenant les côtes.
    Une nouvelle pénalité pour faute volontaire est accordée à l’équipe de Jérém. Ce coup-ci, ce n’est pas lui qui s’y colle, encore trop secoué par le choc. C’est Thierry, un coéquipier qui est aussi un camarade du lycée, un brun pas aussi canon que Jérém, mais avec un charme certain.
    Nouvelle pénalité, nouvelle pénalité ratée. L’équipe adverse mène le match. La mi-temps arrive à point nommé. En quittant le terrain, Jérém a l’air toujours souffrant.
    Flash soudain d’une pipe, de sa queue en moi, du goût de son jus de mec, comme un choc, ça me donne le tournis, je suis comme dans un étant second. Et néanmoins sexy.
    « Putain, qu’il est beau… ».
    « De quoi mon cousin ? ».
    C’est là que je réalise que mes pensées ont glissé sur mes lèvres.
    « Rien… » je tente de me défendre.
    « Tu as dit qu’il est beau, je t’ai entendu… » elle insiste, un grand sourire aux lèvres.
    « Euh, j’ai dit ça ? » je tente de bifurquer sur la rigolade.
    « Oui, oui, t’as dit ça, et je suis presque certaine que tu parles du même mec que moi… » fait-elle, taquine.
    « Tu crois ? » je tente d’esquiver.
    « Je crois que tu n’as pas arrêté de le mater depuis le début du match ».
    « T’exagères ».
    « A peine ».
    « Quoi, c’est pas vrai qu’il est beau ? » j’essaie de relativiser.
    « Si, si, rien de plus vrai, ce mec est juste incroyable » fait-elle, rêveuse « il est beau comme un Dieu et en plus il est très bon joueur… vraiment, il a tout pour lui. Il doit plaire beaucoup aux filles et même à pas mal de mecs… ».
    Ça fait presque trois ans, depuis le premier jour du lycée, depuis que je suis amoureux de Jérém et que j’ai pleinement réalisé que je ne serai jamais le mec d’une nana, que j’ai envie de lui en parler.
    Pourtant, je n’ai pas jamais osé. Ce qui m’a toujours retenu de le faire, ce n’est pas tant la peur que cela puisse changer notre belle relation, car je sais qu’elle comprendrait.
    La raison pour laquelle je ne lui en ai jamais parlé c’est que, dans ma tête, le fait de faire mon premier coming-out ce serait comme entériner mon homosexualité, comme franchir un point de non-retour. Je sais, c’est con, mais au fond de moi, je me dis que tant que personne ne sait, je peux toujours revenir en arrière si je le souhaite. Oui, c’est très con.
    Cependant, depuis que je couche avec Jérém, j’ai plus envie de lui en parler que jamais. Tout « ça » est très nouveau pour moi, d’autant plus que cette « relation » n’a rien d’ordinaire.
    Oui, j’ai vraiment besoin de me confier à quelqu’un, et ce quelqu’un ça ne peut être qu’elle. Et là, j’ai l’impression que le jour est arrivé.
    « Oui, tu as raison, il me plaît à moi aussi »
    « Je m’en doutais un peu… ».
    « Tu m’énerves ! ».
    « Je sais, c’est pour ça que tu m’aimes… ».
    « Il me plaît depuis le premier jour du lycée ».
    « Mais tu sais bien que c’est un mec à nanas ».
    « Oui, je sais bien, mais »
    « Mais, quoi ? »
    « Mais depuis quelques semaines je l’aide à « réviser » les maths…».
    « Et donc…? ».
    « Et donc…depuis, on couche ensemble…»
    « Tu déconnes…» »
    Je fais signe de non avec la tête, en souriant de son étonnement.
    « C’est pas possible… un mec comme lui, ne peut pas être homo… » fait elle, en exagérant son désarroi.
    « Alors que moi… je peux l’être… ».
    « C’est pas ça que je veux dire ! Mais ce mec, quand-même !C’est pas croyable ! Tu l’as dragué ? ».
    « Tu rigoles ? Jamais je n’aurais osé tenter quoique ce soit, surtout avec lui, il m’impressionne trop. Je lui ai juste proposé de réviser, c’est lui qui m’a fait du rentre dedans ».
    « Il avait picolé ? ».
    « Même pas… ».
    « Et depuis, il y a pris goût ? ».
    « Je crois bien… ».
    « Alors là, cousin, tu m’en bouches un coin. Aujourd’hui, tu m’apprends que tu aimes les garçons et que de surcroît tu couches avec un mec canonissime. Dis-le que tu veux la mort de ta pauvre cousine… ».
    « Tu sais, ce n’est que sexuel entre nous…».
    « Alors là, cousin, pour lui c’est peut-être le cas, mais pour toi, j’en doute un peu…».
    Je souris, touché.
    « Tu es amoureux, mon cousin ? ».
    « Je ne sais pas. Je crois que oui… ».
    « Fais attention, Nico, protège-toi pour ne pas souffrir si ça tourne mal…».
    « C’est ce que j’essaye de faire depuis le début…».
    Elle me sourit affectueusement.
    « Je ne l’ai dit qu’à toi, Élodie… ».
    « Je ne dirai rien, Nico, tu le sais…même si on menaçait de me priver de mojito pendant une semaine… ».
    « Tu t’en doutais, alors, Elodie ? ».
    « Un peu, oui… ».
    « Comment ça ? ».
    « Il m’a suffi d’observer où tes regards se posaient lors de nos sorties, c’est-à-dire, jamais sur les nanas… ».
    Les équipes sont de retour sur le terrain pour la deuxième mi-temps. Le brouhaha qui s’en suit nous oblige à couper court à notre conversation. Je fais un bisou sur la joue d’Elodie et je lâche une fois de plus mon regard à la recherche de mon bobrun.
    Le jeu reprend. Malgré l’accident, Jérém retrouve vite sa détermination sur le terrain. Au bout de 15 minutes et de deux essais, il réussit l’exploit de remettre le score de son équipe devant celui des adversaires. Jérém est une véritable machine à marquer.
    L’autre équipe ne se laisse pas faire, elle ne lâche rien, jusqu’à la dernière minute. D’autres points sont marqués, de part et d’autre, mais l’équipe de Toulouse finit par remporter le match.
    Les deux équipes quittent le terrain. Et c’est là que, pendant un court instant, à la faveur d’un détour sur le terrain qui amène mon Jérém assez proche de l’endroit où nous nous trouvons, je rencontre son regard pour la première fois depuis le début du match. Mon cœur bondit dans ma poitrine, et il frôle la fibrillation lorsque le bobrun semble lâcher un petit clin d’œil discret dans ma direction.
    Puis, sans s’arrêter, il continue vers les vestiaires. Et là, ni une, ni deux, il ôte son maillot blanc et vert. Il le fait avec un geste nonchalant et très viril, dévoilant ainsi, aux regards de tous, son torse magnifique et moite, ses muscles chauffés par l’effort du match. Dans la foulée, avec ce même maillot, il s’essuie le front, dégoulinant de transpiration. On dirait une pub pour Coca Cola
    Quand je pense que c’est moi qui me tape « ça » !
    J’entends des nanas crier son prénom, je suis assommé par la jalousie. Mais le bogoss continue son chemin en direction des vestiaires avec ses coéquipiers. Qu’est-ce que je donnerais pour pouvoir les suivre en douce, pour avoir une cape d’invisibilité, pour tout voir, incognito. Ça doit être beau, un vestiaire de rugby, après un match !
    Je le regarde disparaître dans le bâtiment et je me surprends à imaginer la soirée et la nuit qui l’attendent, la troisième mi-temps, la sortie en boîte, les nanas, tant de nanas, trop de nanas à l’affût de se taper le petit champion ultra sexy.
    Pauvre Anaïs, repartie à Bessieres pendant le week-end, et pauvre moi, dont Jérém n’aura pas plus besoin.
    Une fois encore, il va trop « réviser » pendant le week-end »…
    Ce qui ne m’empêche pas de me demander ce que c’était, au juste, que ce petit clin d’œil qu’il m’a lancé juste avant de disparaître dans les vestiaires.  


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